RENCONTRE LITTÉRAIRE À LA BIBLIOTHÈQUE SCHOELCHER, FORT DE FRANCE

Rencontre littéraire autour de l’ouvrage de FARGUES Henry.

Il était une fois la vie au Morne Baldara Nous étions, début mai 1944, dans la maison de Désiré et Osmane Mongin, tout en haut du Morne Baldara, dans le quartier qu’on appelle Raisinier. Les habitants de ce coin de la commune du Saint-Esprit, eux, disaient « La Résignée », sans doute parce qu’il fallait l’être pour habiter loin de tout comme ça. Sur la véranda, en cette fin de matinée, un groupe d’une demi-douzaine de personnes discutaient à voix basse. Il y avait Man Thomas, la matrone en chef. Son assistante, Manzel Reine, était là évidemment. Toutes deux étaient très connues dans notre campagne et ses environs pour leur savoir-faire. Depuis des années, elles procédaient aux accouchements avec beaucoup plus de succès que d’échecs, en ces temps où on venait au monde dans sa maison familiale et à la grâce de Dieu. La Martinique est loin de la métropole, loin de Paris, et nous, à Baldara, encore plus. Nous vivons dans un coin retiré tout en haut d’un morne. Pour améliorer l’ordinaire, on élevait des animaux dont la vente rapportait un peu d’argent. Les plus grands, avant d’aller à l’école, avaient une longue liste de tâches à accomplir comme s’occuper de leurs petits frères et soeurs, donner à manger aux bêtes, nettoyer la maison, aller chercher de l’eau ou, pire, aller vider le pot de chambre. Ça c’était la corvée la plus terrible, généralement effectuée très tôt le matin alors que le soleil dormait toujours… Toujours est-il que ce quartier singulier qui m’a vu naître est l’unité de lieu du début de ce récit de vie dont j’ai eu envie de témoigner. Bien plus tard, quand internet est arrivé, j’ai trouvé trace d’un certain Pierre-Paul Baldara né en France dans le Gers et mort au Saint-Esprit en 1777. Je ne sais pas – et le généalogiste que j’ai interrogé non plus – si le nom de notre quartier pouvait venir de ce monsieur qui a fait souche en Martinique et y est enterré. Mais ça, c’est une autre histoire.

Bibliothèque Schoelcher, rue de la Liberté, Fort-de-France, 0596 55 68 30